Le 24 octobre 2022 notre organisation a saisit la Direction des services judiciaires de demandes relatives à l’évolution de la rémunération des magistrats dans le cadre des « 1000 euros en moyenne » annoncés le mois dernier par le Garde des sceaux .

Voici en substance nos revendications:

  1. L’intégration de la totalité des rémunérations servies dans le calcul des pensions

Notre organisation soutient qu’il n’est pas possible d’augmenter le volet indemnitaire de la rémunération et de créer ainsi un différentiel vécu comme intenable lorsque les magistrats parviennent en fin de carrière.

Il n’est pas rare que la perte de revenus par rapport à la période d’activité soit de 50% ce qui oblige de fait les magistrats qui le peuvent à prévoir une épargne spécifique pour réduire cette différence. Après avoir été sous-payés dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions les magistrats doivent également pourvoir sur leurs deniers à la constitution d’un complément de revenus supplémentaires.

  1. Sur l’objectivation des rémunérations perçues

Notre organisation sollicite que la variation de la « prime modulable » soit ramenée à un taux maximal de 10 % de la rémunération pour chaque membre du corps judiciaire.

La comparaison avec les magistrats de l’ordre administratif est sur ce point éclairante:

D’une part les primes versées sont nettement plus importantes pour les magistrats qui en bénéficient que dans l’ordre judiciaire, mais surtout leur allocation est adossée à un barème connu et largement diffusé au sein des juridictions administratives.

Le complément de rémunération présente donc un caractère « objectif » qui n’est d’ailleurs pas dénoncé par les organisations professionnelles des magistrats de l’ordre administratif.

Augmenter le recours à des rémunérations sur la base de primes non motivées dans des proportions plus importantes que celles actuellement pratiquées ne peut que renforcer l’impression de traitement arbitraire des situations individuelles au sein du corps judiciaire.

  1. La situation des « jeunes » magistrats et le déséquilibre général de la grille indiciaire : dissociation du grade et de la fonction

La grille indiciaire est déséquilibrée en ce qu’elle détermine de faibles rémunérations en début de carrière (qui progressent certes rapidement, mais qui n’en sont pas moins dérisoires au regard des responsabilités exercées); en milieu de carrière elle produit un effet de blocage lorsque les magistrats arrivent à la fin de la grille du premier grade et qu’ils ne sont pas promus.

Enfin au sein même des emplois hors hiérarchie il existe des fonctions qui sont « plus hors hiérarchie que d’autres ».

Notre organisation revendique pour parvenir à résoudre ces difficultés un nouveau déroulement des parcours de carrières qui permettrait une évolution plus « lissée » sur l’ensemble de la carrière et dissocierait le grade et la fonction.

Si la dissociation du grade et de la fonction n’était pas possible, notre organisation soutient la possibilité de voir globalement diminuer les échelons des indices de rémunération du second grade afin de permettre aux jeunes magistrats d’intégrer plus rapidement les indices plus élevés quitte à ce que la durée de la carrière au second grade ne soit pas modifiée. Ils intégreraient directement les échelons correspondant à la 3° année de carrière et atteindraient la fin des indices en 5 ans au lieu de 7 avant de pouvoir réaliser l’avancement.

Notre organisation soutient également la possibilité de voir créer des conseillers référendaires au sein des cours d’appels afin de permettre un transfert des compétences des magistrats les plus jeunes vers les plus anciens et inversement.

  1. En dernier lieu notre organisation attire l’attention de l’administration sur la nécessité de penser la rémunération des magistrats en corrélation avec celle des autres agents du ministère.

L’activité juridictionnelle est au centre du fonctionnement des tribunaux mais elle ne saurait s’exercer sans une multitude de fonctions supports au nombre desquels figurent en premier lieu les agents du greffe.

Bon nombre de ces personnels sont « sur-qualifiés » par rapport aux fonctions, par ailleurs très spécialisées qu’elles doivent exercer et elles souffrent, comme les magistrats de la faiblesse récurrente de l’investissement de l’administration depuis de nombreuses années dans les « ressources humaines » présentes dans les services.

La reconnaissance financière de l’activité que l’administration est en train de préparer ne doit pas être sujette à des critiques en raison de son opacité, ou de sa partialité. Elle ne doit pas avoir pour effet délétère de fracturer encore plus les collectifs de travail au sein du corps judiciaire ni au sein des juridictions.