2022 aura été une « grande année » électorale pour l’ensemble des organisations du ministère de la justice. Les nouvelles instances de représentation ont été mises en place pour les agents autres que les magistrats et pour la première fois le ministère a voté par voie électronique.

Premier miracle: pour une fois, ça marche (évidemment, dans le détail il y a pu avoir des problèmes, mais globalement ça marche) !

Pas besoin de faire 18 000 kms pour mettre un bulletin dans une urne ,on vote depuis son poste de travail et tout va bien.

Deuxième miracle: partie de 37 voix lors du scrutin des tribunaux de la Commission d’avancement, notre organisation en réclote 100 et talonne Unité-Magistrats qui a recueilli 119 voix lors de cette élection.

Certains membres des « gros syndicats » se gausseront bien entendu de ces chiffres, mais peuvent-ils revendiquer une augmentation de leur score de près de 300 % en six mois ?

Notre unique liste présentée pour le CSM « siège » dans un ressort ou nous n’avions aucun candidat auparavant a recueilli 10 % des suffrages.

Nous remercions chaleureusement nos militants qui se sont investis dans la campagne,du renouvellement des CSA ainsi que tous les collègues qui ont voté pour nous.

Premier enseignement du scrutin: deux morts sur la route

Ni la « FSU » ni « C-Justice » ne sont parvenues à conserver leur siège .

La composition du CSA est désormais la suivante:

UNSA-USM: 6 sièges FO : 5 sièges CGT-SM 3 sièges CFDT 1 siège.

Toute la question pour l’avenir sera de déterminer comment le CSA ministériel va fonctionner avec une telle représentation.

Deuxième enseignement du scrutin: le vote des magistrats, ça compte

L’UNSA (14 373 voix) a recuilli 2 177 voix en s’associant à l’USM.

La CGT (6966 voix) a recueilli 908 voix en s’alliant au SM.

Fo (12854 voix) a recueilli 119 voix d’Unité magistrats

La CFDT a recuelli 3 494 voix, dont 100 sous le sigle de CFDT-Magistrats.

Il apparaît que seules les organisations qui sont associées à un syndicat de magistrats ont survécu et que c’est au sein du sigle FO que l’apport des voix des magistrats est le plus faible puisqu’il ne représente pas 1% des suffrages exprimés.

Troisième enseignement du scrutin: pour la représentation des magistrats, le statu quo n’est plus possible

Nous ne nous battons pas contre la représentativité des autres organisations professionnelles et nous les félicitons aussi de leurs résultats. Nous nous battons pour faire progresser la justice.

Et la justice en matière électorale c’est simple: 1 votant = 1 voix.

Dès lors que les voix des magistrats ont une influence directe sur la composition du CSA ministériel (et incidemment des CSA locaux, et du CSA des services judiciaires), il n’est plus possible de maintenir les modes de scrutins actuels au sein du corps judiciaire.

1° un problème constitutionnel.

Le préambule de la Constitution de la IV° République édicte que tout travailleur participe par l’intermédiaire de ses délégués à la détermination collective des conditions de travail.

Les scrutins représentatifs propres à la magistrature sont affectés de biais très graves qui portent atteinte à la possibilité pour chaque magistrat de voir son vote directement receuilli.

Du simple point de vue du droit, et quoi qu’on pense de l’action des organisations syndicales de magistrats, il n’est pas tolérable d’influencer la composition des CSA en raison de l’existence de scrutins indirects particulièrement complexes et coûteux.

Car qui dira que le vote des élections au CSA n’a pas été influencé par celui du renouvellement de la Commission d’avancement et du CSM (ou il n’y a eu dans l’ensemble des ressorts sauf 2 que 2 listes en présence) ?

Pour le dire autrement, on ne peut pas s’appuyer sur une représentativité partiellement « gonflée » par des scrutins indirects pour influencer les résultats du vote des agents publics qui ne sont pas magistrats.

Or c’est bien ce qui se passe aujourd’hui. Est-ce normal ?

2° Simplifier c’est possible

Le vote électronique direct c’est possible et ça marche.

Intérêt pour le budget de l’Etat: un million d’euros en frais de déplacement et journées de travail de magistrats perdues pour l’année 2022.

Maintenir le suffrage censitaire au sein de la magistrature judiciaire c’est choisir de subventionner directement les organisations en place au détriment des organisations émergentes.

L’administration l’avait déjà fait par le passé en attribuant directement un siège à une organisation professionnelle de magistrats sans procéder à un vote. Cette décision administrative avait été annulée par les juridictions administratives.

Aujourdh’ui certaines organisations intègrent des instances représentatives « à la loyale ». Mais elles disposent d’un vélo électrique, là ou les autres doivent compter seulement sur leurs forces physiques pour gravir les pentes. Est-ce normal ?

Le combat contre l’atteinte au suffrage universel direct dans la magistrature doit se poursuivre dans l’intérêt du corps judiciaire tout entier. Nous le poursuivrons sans relâche jusqu’à la reconnaissance de son incontestable légitimité et de son utilité.