Juridictions corses : un déplacement d’office contesté.

Dans une décision publiée le 18 octobre 2024 le Conseil supérieur de la magistrature a procédé au déplacement d’office d’une collègue du siège affectée dans un ressort ou elle avait effectué toute sa carrière pour des motifs tirés d’un manquement de loyauté envers sa hiérarchie. Dans la presse la collègue a indiqué qu’elle entendait saisir le Conseil d’Etat. Au titre de la caractérisation des griefs on peut lire ces phrases :

« Tout manquement par un magistrat à l’obligation annuelle de formation s’analyse en un manquement au devoir de son état. En l’espèce, il résulte du rapport de l’inspection générale de la justice qu’entre 2010 et 2022, Mme W n’a satisfait que faiblement à son obligation de formation continue, se bornant à suivre épisodiquement des formations déconcentrées en XXX à raison d’une journée ou d’une demi- journée:

L’absence de mobilité géographique dont a fait preuve Mme X tout au long de sa carrière et qui excluait de ce fait toute confrontation à d’autres pratiques judiciaires rendait d’autant plus nécessaire le respect par la magistrate de son obligation de se former régulièrement. »

Motifs dont il convient de déduire qu’il ne faut jamais renoncer à une session de formation sous peine de constituer contre soi un grief disciplinaire.

Menaces contre les magistrats du ministère public : le cas des trafiquants de stupéfiants

Dans un communiqué de presse publié le 8 novembre 2024 le Conseil supérieur de la magistrature a justement apporté son soutien aux magistrats à l’encontre duquel des menaces de mort ont été proférées sans toutefois les nommer. En l’espèce il s’agirait du Procureur général de Douai menacé par des délinquants depuis incarcérés (Le Monde, 6 novembre 2024). Nous assurons ce collègue de notre soutien.

Autres menaces contre des magistrats du ministère public : l’avalée des couleuvres…

En revanche aucune communication officielle, sauf erreur de notre part, n’est venue rappeler qu’un membre du ministère public requérant une sanction prévue par la loi à l’occasion d’un procès public régulièrement instruit avait vocation à être protégé même lorsque la personne visée par la réquisition était susceptible d’être candidat à une élection politique d’importance.

Congé pour invalidité imputable au service : le ministère de la justice fait appel et gagne

Un de nos collègues affecté dans un ressort ultramarin a été rapatrié en métropole et a présenté une demande de congé pour invalidité imputable au service, demande qui a été acceptée à titre provisoire par les chefs de sa cour d’affectation. A la suite d’un avis de la commission de réforme locale visant à ne pas lui reconnaitre le bénéfice de ce congé la reconnaissance de l’imputation au service a été déniée par l’administration. Le collègue a saisi le tribunal administratif qui lui a donné raison contre l’administration. Celle-ci a fait appel de la décision et a gagné. Les arguments tendant à voir sanctionner l’absence de tous les membres de la commission de réforme lorsque celle-ci a statué ont été écartés.

Cet arrêt illustre l’articulation des dispositions du statut de la fonction publique dans le champ de la reconnaissance des invalidités imputables au service des magistrats de l’ordre judiciaire et le caractère « spécial » (et donc limité du terme) des dispositions du statut de la magistrature dans l’ensemble des dispositifs de protection qui leur est applicable.

La nécessité d’un « code de l’indépendance » qui devrait englober l’ensemble des dispositions intéressant les magistrats mériterait d’être sérieusement envisagée.

CAA Nantes, 6° chambre 19 novembre 2024, 2TN02409 inédit.

IN MEMORIAM

Nous saluons la mémoire de Véronique Dellelis, présidente de chambre à la Cour d’appel de Douai, qui laisse le souvenir d’une collègue unanimement appréciée. Nos pensées vont à ses proches.